Désabusée, Alice se morfond entre un patron hargneux et une famille dont elle se sent étrangère. Les seules personnes qui trouvent grâce à ses yeux sont les hommes qui la courtisent. Les humiliations cocasses de son supérieur hiérarchique, quelques rares moments de connivence en famille, un peu de douceur dans les bras d’un amant, voilà tout ce qui la sort, parfois, d'une langueur envahissante.
En fait, son présent à elle, c’est l’année qu’elle a passée en Australie dont elle se remémore avec délice les tribulations. La quarantaine, célibataire, l’héroïne est par moment audacieuse. Elle ne manque pas d’ironie, ce qui donne de l’humour à un texte en français impeccable, -- dont la seule concession est un langage parlé désinhibé, en particulier dans les apartés sarcastiques du milieu professionnel --. On y trouve aussi une sympathique intrusion de la langue anglaise et des envolées poétiques pour les souvenirs en flash-backs.
Cependant, Alice se complaît aussi dans de petites compromissions ; ce n’est pas un personnage tout à fait courageux. Pour nous montrer la part d'ombre de son personnage principal, l'auteure use d'un moyen astucieux et original : peu à peu, apparaît Vénus, son double invisible aux autres, qui vit dans son sillage.
Enfin, le roman prend un tournant radical avec une entrée en scène fracassante du dernier (et premier) héros de la vie d'Alice. Difficile à croire de prime abord, l'arrivée de Stiva la star, prend corps dans les regards des proches de notre héroïne, qui au passage s'humanisent un peu.
Des personnages fouillés, un peu manichéens, mais cohérents, une héroïne attachante, de belles scènes en Australie, quelques moments empreints d'une tendresse touchante, des critiques acerbes du monde professionnel, un personnage en arrière plan déjanté, un retournement qui relance bien l'histoire : de bons ingrédients pour un roman qui se lit avec plaisir.