Les oubliés du dimanche, Valérie Perrin

Justine, la vingtaine à peine dépassée, fuit sa vie avec application. Elle se raccroche à celle d'Hélène, qu'elle reçoit par bribes aux Hortensias, la maison de retraite où elle travaille : le jeune femme consigne l'histoire d'amour de la vieille dame dans un cahier bleu, pour son petit-fils, Roman. Chez elle, la vie est lugubre ; elle vit avec ses grands-parents, éteints depuis la mort de leurs jumeaux et de leurs femmes, et avec Jules, son cousin orphelin comme elle. Et elle n'a pas la force de se donner vraiment à cet amant anonyme qui aimerait lui donner un avenir.
L'auteure nous décrit avec minutie des amours mortes, fidèles ou honteuses, au gré des réminiscences d'Hélène, et des investigations de Justine dans son histoire : car une mystérieuse affaire de corbeau secoue les Hortensias et son aide-soignante : celle-ci apprend ainsi que l'accident qui a anéanti sa famille a aussi ses zones d'ombres.

Un travail magistral : cette double saga tient en haleine, et émeut. Poétiques, drôles, tragiques, ces destins entremêlés, ces fautes impardonnables, ces courages de tous les instants, nous font osciller entre horreur et attendrissement ; et, peu à peu, la vie de Justine, qui n'était qu'un prétexte, qu'un révélateur, prend de l'épaisseur au contact de ces découvertes.

Une vie à t'attendre, Alia Cardyn

Rose ne parvient pas à aimer, l'absence creuse sa vie, inéluctablement : ses parents ont disparu mystérieusement lorsqu'elle était petite fille. Après une énième rupture, elle se réfugie dans la maison d'Oscar, un ami orphelin. Et tente une nouvelle fois de comprendre.
Différents flashback nous permettent de retracer par petites touches ce qu'elle a vécu, et ce qu'a vécu sa mère alors qu'elle avait le même âge qu'elle.
Petit à petit, Rose semble grandir au travers de rencontres sorties du passé. La fidélité de personnages qui lui sont dévoués entretient l'espoir de se libérer de ses questions.
L'intrigue est bien construite. La renaissance de Rose est agréable à suivre, la romance bien dosée. Je reste un peu dubitative sur la chute, certains personnages sont traités de façon un peu manichéenne à mon goût. Cependant, je me suis beaucoup attachée au personnage de Rose ; je me suis laissée entraînée par sa quête, qui soulève des questions pertinentes sur la nécessité de connaître la vérité.

Article 353 du code pénal, Tanguy Viel

Dès le premier chapitre, le livre nous met dans un état de confusion : le meurtrier est un monsieur-tout-le-monde. Et nous voilà embarqué devant un juge atypique : un magistrat qui prend le temps, tout le temps qu'il faut, pour se forger une intime conviction.

L'auteur nous plonge dans une tragédie étouffante dont l'issue inexorable est pesante : seule l'écoute insatiable du juge laisse entrer un peu de lumière dans ce huit-clos. La descente aux enfers de cet homme berné, humilié, est édifiante, crédible, mais pour moi, elle étouffe un peu l'élaboration ici à peine évoquée, du processus salvateur de la justice humaine. Un parcours prenant néanmoins, qui nous ouvre une porte dérobée dans le monde de la criminalité, un début de compréhension possible de ces êtres dont nous ne savons que faire, et dont le traitement nous pose, de tous temps, des cas de conscience cornéliens.

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