Dans un monde où l'électricité n'est plus qu'un lointain souvenir, la survie prend un sens nouveau. Dans mon roman, À la hauteur, j'explore les défis d'une société post-apocalyptique, où l'eau devient une ressource cruciale, car difficile à obtenir. On espère remettre en route des infrastructures passées, comme les châteaux d'eau, mais il faut bien se débrouiller en attendant.
Extrait :
À la sortie du village, je repère un bidon bleu. Mes grands-parents
maternels avaient le même : il contenait de l'eau de pluie, ce qui
m’avait bien étonnée quand je les avais rencontrés pour la première fois (à
l’adolescence), ne connaissant que l’eau provenant d’un robinet ou en
bouteille. En l’occurrence, celle que m’a fournie Emma est vide depuis belle
lurette. Je revois son air coupable lorsqu’elle m’a avoué :
« Désolée, je garde les plus grandes, tu comprends… » et lui
adresse en pensée : « Pas grave, tu vois, je me débrouille
toujours. »
Malheureusement, l’eau y est croupissante et je n'ose pas la boire ;
je m’asperge cependant le visage avec ce liquide douteux et je poursuis
péniblement ma route jusqu’au hameau suivant. La soif est devenue
difficilement supportable.
Cette fois-ci, j’arrive devant une maison dont la façade aux tons de terre
cuite semble assez récente : cela me rassure. Je chausse alors mes
escarpins et je me manifeste.
Une femme d’une cinquantaine d’années m’ouvre. Elle est déjà coiffée et je
me fais la réflexion qu’elle doit avoir un bon coiffeur, mais avant toute
chose, je lui réclame un verre d’eau plutôt que l’adresse de cet
artiste !
— Attendez, j'enfile une veste.
Elle revient et me serre chaleureusement la main.
— Call me Micky.
Malgré mon rêve américain et les origines de mon fils, je crains le
contresens même sur des phrases simples.
La faute de Dan qui ne m’a jamais emmenée là-bas !
Mais un clin d’œil complice de Micky détourne mon embarras. Après m’avoir
expliqué que nous allons puiser l’eau, elle m’entraîne à travers la maison.
Le temps que nous descendions les escaliers, je sais déjà qu’elle a un fils
et qu’elle aimerait qu’il vienne plus souvent la voir. Tout en accrochant le
seau au crochet du puits, elle commente :
— Le maire nous a promis que nous pourrons relancer les pompes du
château d'eau, toutefois, pour le moment, nous avons la consigne de
n'utiliser l’eau courante qu'en cas de besoin extrême.
— Vous n'êtes pas en besoin extrême alors ?
— Pas encore, non, murmure-t-elle.
J'aide à transporter le seau jusqu'à la cuisine. Elle y plonge un broc en
porcelaine et me tend un verre. J'ignore comment j'ai pu tenir jusque-là. En
me regardant boire avidement, elle me demande :
— Depuis quand n'avez-vous pas fait un vrai repas ?