Partir sans même dire au revoir. Et recommencer.
Combien d'entre nous se sont retrouvés à la lisière de ce désir ?
Ce roman est une mise en abyme d'une pulsion probablement commune, dont
l'auteur explore la difficile mise en œuvre - car on a du mal à croire que
cela puisse être une solution de facilité quand bien même ce serait une
fuite.
En toile de fond, une mère maltraitante, mais pas que : Violaine ne peut pas
la haïr tout à fait, même si son enfance malheureuse a creusé un tel vide en
elle qu'elle ne se sent plus capable d'avoir des relations authentiques avec
son mari, sa fille et ses amis - qu'elle chérit pourtant.
Et dans ce périple, le plus ardu est de devoir mentir à ceux qu'elle
rencontre, compromettant tout nouveau départ. Peut-être aussi d'habiter une
personne factice : la nouvelle Alice ne se reconnaît pas elle-même dans sa
nouvelle identité.
L'auteure nous propose un retournement qui pourrait rendre possible des
retrouvailles, sans pour autant, là encore, sombrer dans la facilité.
J'ai été touchée par la douleur de Violaine qui a pris conscience peu à peu
qu'elle devait remettre en question les agissements de sa mère vis-à-vis
d'elle-même et par le trouble d'Alice qui ne sait plus comment retrouver une
certaine authenticité après avoir tenté d'arracher les racines la ramenant à son origine sordide. Ce roman n'apporte pas de réponses et c'est
tant mieux. Il donne des pistes. Offre de compatir à l'inacceptable, autant
que possible. Et condamne l'horrible négligence de parents incapables
d'assumer qu'ils puissent être l'unique père, mère, d'un enfant qui ne
pourra pas faire l'économie de ses racines.